Annabel, de Kathleen Winter

Quand on se retrouve dans le cadre du club de lecture rdv p.17, il y a forcément plein de livres sur la table autour de laquelle on discute. Des livres qu’on a prévu de lire, des livres qu’on a lus, des livres qu’on veut prêter, des livres qu’on prend en main, dont on lit la quatrième de couverture. Des fois on les repose, des fois on demande à qui c’est, si on peut l’emprunter.

Lorsque j’ai vu cette couverture étrange, que j’ai lu le résumé à l’arrière, j’ai demandé à qui c’était, je n’ai pas bien compris mais Christine m’a dit que je pouvais l’emprunter. Dont acte.

Le résumé

1968, un bourg côtier du Labrador au Canada. Un enfant naît, ni garçon ni fille. Hermaphrodite. Ils sont trois à partager ce secret : les parents et une voisine de confiance. On décide de faire opérer l’enfant ; ce sera Wayne – le choix du père. Mais dans l’eau trouble de l’adolescence, son moi caché, cette Annabel qui l’accompagne comme une ombre, réapparaît. Et avec elle, la vérité. Un magnifique roman sur la différence et l’identité, porté par une langue poétique où vibrent intimement la Nature et les êtres.

Ce que j’en dis…

Encore un livre vers lequel je ne me serais pas tourné spontanément et qui ne m’aurait pas spécialement attiré s’il ne s’était trouvé juste devant moi, sur une table, à portée de main. Parfois la vie est bien faite.

Parfois pas. De l’hermaphrodisme je ne savais pas grand chose sinon sa définition et une blague de Coluche qui disait « Sheila c’est un homme, comme Dave ». Les boomers comprendront. N’empêche, voilà bien une condition pour le moins intrigante, un homme et une femme, les deux dans le même corps, un choix à faire, celui des parents, une chance sur deux de se planter. Ou bien peut-être que le simple fait de faire un choix constitue déjà un plantage.

C’est ce genre de questionnement qu’aborde Kathleen Winter avec Annabel. Mais elle le fait avec une grâce incroyable, une poésie constante et une douceur réconfortante. J’ai beaucoup aimé tout ce livre, particulièrement la fin où, je le dis sans rien spoiler, le père de Wayne lui montre à quel point il l’aime. Avant cela c’est un père rustre, un trappeur qui passe plus de temps dans la forêt que dans sa maison, assorti à une mère dépressive qui lâche prise de plus en plus au fil des années. Il y a une amie qui rêve de devenir chanteuse, et Wayne qui se rêve nageuse soviétique de natation synchronisée.

Il y est aussi question de ponts, de désir féminin dans un corps d’homme, d’une multitude de problèmes que seul un hermaphrodite sera en mesure de rencontrer. S’opère alors la magie de l’empathie : à cette personne que l’on se sera jamais on parvient à s’identifier. C’est le miracle de la littérature et c’est un bonheur inégalable.

L’autrice

Kathleen Winter, née en 1960, a écrit de nombreux textes pour la télévision. Elle est l’auteur d’un recueil de nouvelles, Boys (2007), et d’un roman, Annabel (2010), finaliste pour plusieurs prix prestigieux, dont le Giller Prize, le Prix du Gouverneur général et le prix Orange. Kathleen Winter vit à Montréal avec son mari.

Annabel, de Kathleen Winter est publié chez 10/18.
Le livre de poche de 480 pages est vendu 8,80€.
Paru le 4 septembre 2014.

2 commentaires

  1. Certainement. Mais il n’a pas été réédité apparemment. Donc, à chiner, à emprunter à la bibliothèque ou à ramener d’un club de lecture.

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