Les Nomades du Fer, de Eleanor Arnason

Il y a forcément un petit quelque chose de jouissif à finir la lecture d’un bouquin de 580 pages le jour de sa sortie en librairie. Appelons ça un privilège.

Mais qu’on le lise aujourd’hui, demain ou dans 2 ans, Les Nomades du Fer procurera assurément les mêmes extraordinaires sensations à son lecteur.

Qu’on se le dise, ce livre est un monument !

Le résumé

Tandis que la Terre peine à se relever de la pollution et de la surexploitation de ses ressources, Lixia, une anthropologue, est envoyée vers une planète qui orbite autour de l’étoile Sigma Draconis. Elle et son équipage sont chargés d’observer les sociétés qui s’y sont développées sans interférer avec les populations locales.

Nia, quant à elle, est une artisane parmi celles et ceux que l’on nomme le Peuple du Fer. Marginalisée parce qu’elle a autrefois aimé un homme, c’est elle qui est choisie pour guider les terriens sur son monde où, au prix d’une séparation entre les hommes et les femmes, guerre et violence n’ont ni sens ni existence.

Toutefois, voilà qu’au sein de l’équipage divisé du vaisseau, la colère gronde et les conflits se multiplient, au risque de tout détruire. L’amitié naissante entre Nia et Lixia résistera-t-elle à ces dissensions ?

Ce que j’en dis…

Commençons par saluer la démarche éditoriale des très belles éditions Argyll qui sont allées dénicher ce petit bijou de littérature américaine publié outre-Atlantique en 1991 !

Ce pavé monumental portant une magnifique illustration de couverture de Xavier Collette est un objet fascinant. Dense, épais, lourd, il impressionnera peut-être le lecteur habitué à lire des oeuvres de plus modestes dimensions. Pour ma part, j’ai pris autant de plaisir à le manipuler qu’à le lire : le poser sur ma table basse, l’ouvrir, poser le marque-page à son côté, il y avait quelque chose qui tenait de la cérémonie. On lit parfois comme on boit du thé…

Difficile de classifier ce livre de science-fiction qui a des allures de fantasy. J’y ai vu une exploration exo-anthropologique, une fable politique, un essai sociologique. Tout cela en plus du roman de SF promis.

C’est aussi la visite guidée d’une planète habitée par des extra-terrestres rappelant furieusement les visions artistiques des pseudo ancêtres de l’humanité selon Darwin.

Des hominidés velus et pensants, ayant élaboré un modèle de société matriarcale duquel les hommes sont exclus, relégués au rang de procréateurs asociaux.

Eleanor Arnason se pose en écrivaine démiurge, décrivant cette planète, ses habitants, sa faune et sa flore, son histoire et son fonctionnement d’un bout à l’autre du roman.

On en prend plein les yeux, c’est très visuel, très coloré, une adaptation en BD serait une excellente idée. Oh oui ! Les Nomades du Fer en roman graphique serait phénoménal !

Mais phénoménal, le roman l’est déjà. La population de la planète explorée, son fonctionnement tribal basé sur la reconnaissance et la franchise sont très inspirants. Je comprends qu’ Ursula K. Le Guin ait trouvé ce livre « irrésistible et fascinant« . Je partage totalement son avis.

J’ai grapillé chaque petite minute de mes journées pour lire, passer du temps à explorer, à écouter les histoires des unes et des autres protagonistes de l’ouvrage.

La dernière partie du livre, plus centrée sur les personnages terriens donne à réfléchir sur le naufrage politique des différents systèmes expérimentés au cours des siècles et particulièrement sur le capitalisme et le marxisme, deux fruits pourris sur un arbre aux racines ravagées par l’avidité et l’égoïsme.

Les Nomades du Fer donne envie de tout reprendre au début, de fuir en avant vers un mode de vie simple et authentique, dépollué de la valse stupide des apparences et de la superficialité de mise aujourd’hui.

Par contre, si on pouvait éviter d’exclure les mâles, je serais content. J’ai un peu de mal avec la solitude…

Les Nomades du Fer, d’Eleanor Arnason, est publié par les éditions Argyll.
La traduction française est de Patrick Dechesne.
Le livre broché de 580 pages est vendu 26,90€.
Date de parution : le 3 novembre 2023.

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