Les détails, de Ia Genberg

Mes circonvolutions des derniers mois sur les réseaux sociaux m’ont amené à éprouver une certaine curiosité, et même une forme de désir pour une jeune et belle maison d’édition marseillaise : Le bruit du monde.

Ses parutions de 2023 m’ont donné envie de fragiliser ma PAL mais je suis un garçon raisonnable. Je me suis contenu. Puis j’ai décidé que 2024 serait l’année de sa découverte.

Nous y sommes.

Les détails de Ia Genberg est paru le 4 janvier.

Le résumé

Une femme est clouée au lit, fiévreuse. Sans pouvoir expliquer pourquoi, elle a soudain l’envie de relire la Trilogie new-yorkaise de Paul Auster. De là, elle commence à se remémorer des moments de sa vie, notamment sa vingtaine dans les années 1990, à l’aube du tournant de l’an deux mille. Les méandres de ses souvenirs forment une prose magnétique nourrie de nostalgie et de réflexions existentielles irrésistibles, le tout agrémenté de références réjouissantes à la littérature. Son existence semble se résumer à quatre relations dont un amour indélébile, une amitié sauvage, une rencontre électrique et éphémère. Elle en tire des portraits inoubliables dont les sujets sont à la fois celle qui raconte et ceux qui sont racontés, une perspective, des détails que l’on remarque ou pas, une histoire de relations qui se font et se défont avant que l’ère numérique ne vienne bouleverser les rapports humains.

Ce que j’en dis…

Pardonnez-moi le sens du détail mais il y a d’abord cette charte graphique : un huitième de cercle, puis un quart, puis un demi qui se suivent et dévoilent successivement un ingrédient supplémentaire de l’histoire qui nous attend. Ensuite vient la couverture à rabats. Je suis amoureux des couvertures à rabats. C’est ainsi.

Après ce premier contact sensuel et réjouissant, je me plonge dans l’histoire.

Dans mon petit jardin il y un bassin qui contient une dizaine de poissons virevoltants sous la surface limpide. Un système astucieux permet à l’eau de circuler en circuit fermé, alimentant une cascade dont le bruit entêtant peut me subjuguer des heures durant.

Les détails m’a procuré le même effet apaisant.

L’écriture s’écoule à une rythme lent et régulier qu’on devine immédiatement bénéfique pour l’esprit. Sorte d’hypnotique soliloque, la prose d’Ia Genberg n’a de cesse de bercer le lecteur. Elle s’exprime comme le ferait une amie avec qui on passe une nuit blanche à se raconter dans des lits jumeaux, espacés d’un mètre à peine dans une pièce petite et confortable. Mais ici il n’y a qu’elle qui parle. Le sommeil nous quitte, on écoute avec délectation.

Je partage avec la narratrice cet intérêt singulier pour l’état fiévreux.

Pas encore la fièvre délirante, douloureuse, mais celle qui exacerbe légèrement notre perception. Celle qui nous porte à poser un regard intrigué sur les choses, sur les gens, sur nous-même.

C’est à travers cet étrange filtre qu’ Ia Genberg nous offre les digressions de sa mémoire, délitement précis d’une musicalité entêtante.

Il convient donc obligatoirement de saluer le travail, l’œuvre de traduction d’Anna Postel qui a su préserver et peut-être même sublimer (mon ignorance de la langue suédoise ne me permet pas d’en juger davantage) le texte original.

A propos de l’autrice

Photo de Sara Mac Key

Ia Genberg est née à Stockholm en 1967. Elle a d’abord été journaliste avant d’écrire son premier roman en 2012. Elle est également l’autrice d’un recueil de nouvelles et de deux autres romans, dont le dernier, Les détails, est paru en 2022 dans son pays d’origine. Lauréat du prix August 2022, ce livre a reçu un succès critique autant que commercial. Après s’être vendu à plus de 200 000 exemplaires en Suède, il sera traduit dans pas moins de 30 pays.

Les détails, de Ia Genberg est édité par Le bruit du monde.
Le livre broché de 176 pages est vendu 21€.
Paru le 4 janvier 2024.

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