Un crocodile s’en allait à la guerre, de Antti Tuomainen

Peut-on mélanger avec succès l’humour et le suspens ?

Un thriller peut-il être vraiment drôle ?

L’exercice peut sembler risqué, voire téméraire, pourtant Antti Tuomainen le réussit haut la main avec la suite de Ce matin, un lapin (que je n’avais malheureusement pas lu).

Le résumé

Même un as du calcul de risque peut se retrouver démuni face à l’imprévu…

Alors qu’Henri vient tout juste de mettre de l’ordre dans sa vie personnelle et au parc d’aventure que son frère lui a légué, un homme du passé resurgit, entraînant avec lui son lot de bouleversements. Pour ne rien arranger, son fournisseur refuse de lui vendre, sous des prétextes obscurs, le Grand Élan supposé devenir l’attraction phare du parc. Tout cela au moment même où sa relation avec Laura atteint un point de rupture.

S’il veut survivre à ces nouvelles épreuves, Henri le mathématicien devra exécuter ses comptes avec plus de précision que jamais – et pousser chaque calcul jusqu’à l’extrême limite !

Ce que j’en dis …

Comme je le précise en introduction, je n’avais pas lu Ce matin, un lapin… Toutefois, lors de sa parution chez Fleuve, en 2022, il m’avait fait de l’œil et je ne voulais pas passer à côté de l’occasion de découvrir Antti Tuomainen une deuxième fois.

Cet auteur excelle dans une forme littéraire assez décalée : la comédie noire.

Il y a là quelque chose qui tient gentiment de l’oxymore et ce n’est pas pour me déplaire…

Précisons sans plus attendre que je me suis régalé de ce roman sous plus d’un rapport. En réalité, la vision de l’oxymore est sans doute liée à la différence culturelle. Ce qui aurait pu passer pour une farce sous la plume d’un auteur français ne prête pas à ce genre de confusion quand il est question d’un auteur finnois.

Un crocodile s’en allait à la guerre est réellement un thriller drôle. Et non, ce n’est pas un oxymore, c’est simplement une rareté.

La tension narrative est réelle, l’intrigue aurait pu faire l’objet d’un roman noir absolument anxiogène. Mais pour le coup, le lecteur aborde chaque nouveau chapitre avec le sourire aux lèvres … et la boule au ventre malgré tout.

Henri Koskinen, le personnage principal de l’histoire est une superbe figure d’antihéros. Mathématicien spécialisé dans l’application des statistiques pour le compte d’une compagnie d’assurances, il se découvre gérant d’un parc d’aventure (à ne pas confondre avec un parc d’attractions : dans un parc d’attractions les clients sont secoués par les machines, dans un parc d’aventure ils se secouent tout seuls) suite à un héritage pour le moins surprenant.

Plus doué pour les calculs que pour les rapports humains il se retrouve confronté à la mafia locale, à la police locale, à des employés pour le moins surprenants, et j’en passe pour ne rien dévoiler de l’intrigue.

C’est sans le moindre humour mais avec une drôlerie permanente qu’il gère ses affaires dans un cadre qui prête à sourire benoitement : un parc d’aventure pour les gosses.

Antti Tuomainen parvient même à greffer là-dessus une histoire d’amour étrangement émouvante et ce roman n’a pourtant rien de désordonné en dépit du caractère indéniablement foutraque de la plupart des protagonistes.

Au final c’est une double réussite : un vrai roman noir, un thriller flippant comme on les aime et tout à la fois, une comédie burlesque, marrante de bout en bout.

Qui a parlé d’oxymore ?

L’auteur

Antti Tuomainen, auteur finnois né en 1971, est traduit dans plus de vingt-cinq langues et s’affirme aujourd’hui comme le maître de la comédie noire décalée à la scandinave. Après Ce matin, un lapin … il poursuit sa trilogie mettant en scène un antihéros inadapté au grand coeur, dont la puissance rationnelle n’a d’égale que son indubitable dimension comique.

Un crocodile s’en allait à la guerre, de Antti Tuomainen, traduit du finnois par Anne Colin du Terrail, est édité par Fleuve.
Le livre broché de 320 pages est vendu 21,90€.
Paru le 22 février 2024.

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