Avec quatre romans mis en avant pour la rentrée 2024, La Manufacture de livres va un peu à l’encontre du principe de minimalisme envisagé par d’autres maisons d’édition. Mais personne ne trouvera à s’en plaindre si l’on s’en réfère à la qualité des ouvrages en question.

Tout comme La Fille près du feu de Tiphaine Le Gall et Le Pouilleux massacreur, de Ian Manook, Le Bruit de nos pas perdus de Benoît Séverac est un régal pour l’esprit.

Le résumé

À la Crim’ de Versailles, le commandant Cérisol a enfin une équipe opérationnelle. Un jeune pro du taekwondo à l’instinct très sûr, un adjoint sexagénaire qui gère ses dossiers aussi bien que sa famille nombreuse et une nouvelle recrue, jeune femme de caractère prête à se tailler une place dans ce cercle résolument masculin. Ils ne sont pas trop de quatre pour faire face aux affaires qui s’accumulent : d’abord un corps anonyme momifié est abandonné au cimetière. Ensuite, il y a l’apparent suicide d’une jeune femme à qui tout semblait sourire. À ces mystères vient s’en ajouter un qui bouleverse Cérisol : sa femme Sylvia, partie pour une compétition handisport au Japon, ne donne plus signe de vie…

Au gré des enquêtes de cette équipe de flics, on découvre leurs rêves brisés, leurs combats du quotidien, des mensonges et des vies qui basculent. Benoît Séverac signe un nouveau roman policier plein de finesse et d’humanité qui nous raconte que c’est parmi les hommes et les femmes ordinaires que l’on trouve les criminels comme les héros.

Ce que j’en dis…

Je découvrais Benoît Séverac assez tardivement avec son précédent roman édité à La Manufacture de livres, Le Tableau du peintre juif (2022) et ce fut déjà un coup de cœur à l’époque.

Avec Le Bruit de nos pas perdus, mon plaisir est encore un cran au-dessus. Cette fois-ci il s’agit plus exactement d’un roman policier proprement dit mais qui reste pourtant très différent de ce qu’offre ce genre littéraire en général.

La différence est liée au fait que l’auteur laisse beaucoup plus de place aux personnages et à leur intimité qu’à l’action policière – même si elle ne manque aucunement. Ainsi, chaque protagoniste de ce roman d’une grande richesse narrative est particulièrement attachant, que ce soit les quatre policiers de l’équipe, la procureure, les victimes et même les coupables, tout le monde possède une riche dimension intérieure et des enjeux dramatiques personnels tout à fait dignes d’intérêt, voire souvent émouvants ou poignants.

Cette dimension très humaine m’a souvent fait penser au film de Maïwen, Polisse (2011) avec Marina Foïs et Joey Starr dans les rôles principaux.

Il y a en effet à la fois une inattaquable fidélité au genre policier mais également une dimension dramatique, sociale qui donne au roman une saveur presque nostalgique, une forme de compassion et de bienveillance fondamentale qui vient faire en sorte que les lignes élémentaires séparant les méchants des gentils en viennent à se mouvoir discrètement pour englober assez logiquement une humanité souffrante en prise avec la noirceur des évènements de la banale vie quotidienne.

Le lecteur s’attache nécessairement à cette petite équipe de la police criminelle versaillaise au point de voir dans le dernier chapitre la promesse d’un futur épisode des aventures modestes et indispensables de ces professionnels du combat contre le crime, tous d’une grande humilité.

Pas de héros à l’égo surdimensionné, des gens comme nous, des flics qui font leur boulot comme un vieux boulanger qui ferait du bon pain.

Forcément, on en redemande !

L’auteur

Benoît Séverac a grandi dans les Pyrénées. Diplômé du Wine and Spirit Education Trust de Londres, il a exercé plusieurs métiers avant de devenir professeur d’anglais à l’école vétérinaire de Toulouse. Benoît Séverac est auteur de romans pour adultes et pour adolescents. Il a déjà publié Trafics, 115, Tuer le fils et Le Tableau du peintre juif à La Manufacture de livres.

Le Bruit de nos pas perdus, de Benoît Séverac est édité par La Manufacture de livres.
Le livre broché de 288 pages est vendu 18,90€.
Paru le 5 septembre 2024.